Sir Bob Geldof avait initié en 1984 une nouvelle vague de
chansons pour soutenir une cause, Do they know it’s Christmas? Réalisée avec plusieurs chanteurs britanniques dont Phil Collins, Bono,
George Michael, Sting, David Bowie et Paul McCartney réunis sous le nom Band Aid, cette innovation avait permis, à l’origine, de récolter plusieurs
millions de dollars pour venir en aide aux Éthiopiens, aux prises avec une dure
famine.
Cette approche avait été reprise par un supergroupe américain, USA for Africa, avec la chanson We are the World écrite et interprétée par Michael
Jackson et Lionel Ritchie, coproduite par Quincy Jones, avec des invités comme
Stevie Wonder, Paul Simon, Tina Turner, Billy Joel, Diana Ross, Bruce
Springsteen, Bob Dylan et Ray Charles et bien d’autres.
Même le
Québec avait eu sa version en 1985 avec Les yeux de la faim, écrite par le journaliste Gil
Courtemanche et mise en musique par Jean Robitaille, avec Daniel Lavoie,
Martine Saint-Clair, Michel Rivard, Céline Dion, Jean-Pierre-Ferland, Gilles
Vigneault, Yvon Deschamps, Renée et Nathalie Simard ainsi que presque tous les
chanteurs populaires de l’époque. J’y étais, puisque j’avais conçu la pochette
du disque, illustrée par mon ami Claude Lafrance. C’était en fait ma première
incursion dans le monde de la publicité sociétale.
Rappelons,
pour l’histoire, qu’on doit tout de même au Beatle George Harrison l’idée de
réunir, en 1971 au Madison Square Garden de New York, ses amis pour une grande
fête, The Concert for Bangladesh, avec Éric Clapton, Bob
Dylan, Billy Preston, Ringo Starr et Ravi Shankar. Un évènement, mais un échec,
l’argent ne s’étant jamais vraiment rendu à destination à cause des coûts de
production élevés du disque et du film… On
peut d’ailleurs se poser la question à propos de quelques chansons et autres
concerts bénéfices. Qui est gagnant, la cause ou les interprètes?
En France, c’est
Coluche qui a eu l’idée des Restos du
Cœur en 1986, avec un « tube » écrit par Jean-Jacques Goldman qui
se préoccupait des « pauvres locaux » : Aujourd’hui, on n’a plus le droit
d’avoir faim, ni d’avoir froid. Puis
il y a eu des reprises, 20 ans plus tard, de Do they know it’s Christmas? Et 25 ans plus tard, de We
are the World pour Haïti. Et récemment, une nouvelle mixture de Do
they know it’s Christmas? pour
lutter cette fois contre le virus Ebola.
Quand on lit
les principales critiques, on se rend compte que ça ne fait vraiment plus
l’unanimité. On a presque plus entendu parler du refus de la chanteuse Adel de
participer au Band Aid 30. Doit-on
conclure que la formule est dépassée? Pas nécessairement.
Une des
raisons de la propagation d’Ebola est un problème de communication. Beaucoup
d’Africains sont en effet mal informés de ce qu’il faut faire pour éviter cette
maladie. Nombreux sont analphabètes et difficiles à joindre. On a donc réuni autour de Tiken Jah Fakoly un collectif de musiciens
africains pour enregistrer une chanson pédagogique : Africa Stop Ebola.
Elle met aussi en vedette Amadou & Mariam, Salif Keita, Oumou
Sangaré, Kandia Kora, Mory Kanté, Sia Tolno, Barbara Kanam et les rappeurs
Didier Awadi, Marcus de Banlieuzart et Mokobé. Ces noms ne vous disent pas
grand chose, à part peut-être les premiers… mais vous n’êtes pas le public
cible! La chanson s'adresse aux citoyens et les informe de ce qu'ils peuvent
faire pour aider à arrêter la propagation du virus. Les artistes chantent en
français et dans les langues vernaculaires des régions concernées pour
s'assurer que le message est entendu quel que soit le niveau d'alphabétisation
et d'éducation de la population. Là on parle de pertinence! Do
they know it’s Christmas? On
s’en fout, plusieurs sont Musulmans et ne connaissent ni Geldof, ni Bono,
malgré son grand intérêt pour sauver les Africains du VIH.
J’avoue, j’ai aussi utilisé le clip pour des causes,
localement. En 2000, j’avais réalisé pour la Société de l’assurance automobile
du Québec, à partir d’images vidéo de la mort en direct de Mathieu, un jeune
conducteur de Dosquet, sur la Rive-Sud de Québec, tournées par ses amis. J’avais
alors fait appel au groupe Projet Orange qui avait composé la chanson De Héros à Zéro pour parler directement aux jeunes de 16 à 24 ans afin qu’ils réduisent
leur vitesse sur les routes. Non seulement elle livrait un message pertinent,
mais elle compta parmi les dix chansons les plus demandées à MusiquePlus en l’an 2000 et elle resta le
plus grand succès du groupe.
Efficace? Il y a une évolution, mais il ne faut jamais
arrêter de communiquer dans tout ce qui s’appelle « changements de comportements ».
L'amélioration du bilan routier chez les 16-24 ans demeure une priorité pour la
SAAQ puisqu'ils sont toujours surreprésentés chez les victimes. En 2012, ils
représentaient plus du quart des décès (26 %) et ont été impliqués dans 20 %
des collisions mortelles alors qu'ils ne représentent que 10 % des titulaires
de permis de conduire.
Causes? Toujours!
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